Législation

REGIME JURIDIQUE DE LA PRESSE & REGIME JURIDIQUE DE LA COMMUNICATION AUDIOVISUELLE EN COTE D'IVOIRE

AVERTISSEMENT

            Dans le cadre de sa mission de diffusion de l’information juridique, le Centre National de Documentation Juridique publie, à travers ce recueil :

 ¨    La loi n° 2004-643 du 14 décembre 2004 portant régime juridique de la presse ;

 ¨    La loi n° 2004-644 du 14 décembre 2004 portant régime juridique de la Communication audiovisuelle ;

 ¨    Le code de Déontologie.

                                                                                                          Abidjan, août 2006

                                                                                                                La Direction

 

LOI N° 2004-643 DU 14 DECEMBRE 2004 PORTANT REGIME JURIDIQUE DE LA PRESSE

TITRE PREMIER - DISPOSITIONS GENERALES

ARTICLE PREMIER

La parution de tout journal ou écrit périodique est libre, sous réserve du respect des conditions prescrites à l’article 6.

 ARTICLE 2

 Au sens de la présente loi, on entend par « journal » ou « écrit périodique » toute publication paraissant à intervalles réguliers et utilisant un mode de diffusion de la pensée mis à la disposition du public ou de catégories de publics.

 ARTICLE 3

Est définie comme une entreprise de presse, toute unité de production, qui a pour objet l’édition d’un journal ou écrit périodique en vue de sa diffusion.

 ARTICLE 4

 La distribution de tout journal ou écrit périodique est libre.

 ARTICLE 5

 Tout journal ou écrit périodique est placé sous la responsabilité d’un directeur de publication.

 ARTICLE 6

Avant la parution de tout journal ou écrit périodique, il sera fait au Parquet du Procureur de la République dans le ressort duquel se trouve le siège du journal ou de l’écrit périodique, une déclaration de publication, en double exemplaire comprenant :

 1/ Les pièces justificatives de l’existence juridique de l’entreprise de presse ;

 2/ Le titre du journal ou écrit périodique, sa nature et sa périodicité ;

 3/ Les noms, prénoms, filiation, nationalité et adresse complète du directeur de publication et des principaux associés détenant individuellement ou collectivement plus des 2/3 du capital social conformément à l’article 12 ci-dessous;

 4/ Le casier judiciaire, volet B3 du directeur de publication ;

 5/ L’adresse géographique de l’établissement où va se dérouler l’activité de rédaction du journal ou de l’écrit périodique ;

 6/ La dénomination et l’adresse de l’imprimerie où il doit être imprimé ;

 7/ Une lettre d’engagement écrite, datée et signée par le directeur de publication à respecter et à appliquer la convention collective interprofessionnelle régissant le secteur de la presse.

 Toute modification apportée aux indications ci-dessus énumérées sera déclarée au Parquet du Procureur de la République dans les trente jours qui suivent.

Une copie de la déclaration et les modifications ultérieures transmises au Parquet du Procureur de la République seront mises par celui-ci à la disposition du Conseil National de la Presse dans un délai de quinze jours.

 ARTICLE 7

La déclaration de publication faite par écrit et signée du directeur de publication est déposée auprès du Procureur de la République. Il lui en est délivré un récépissé dans les quinze jours. Le refus de délivrance du récépissé doit être motivé.

Le Procureur de la République adresse copie du récépissé au Conseil National de la Presse dans un délai de quinze jours.

ARTICLE 8

Le titre d’un journal ou écrit périodique est libre et ne peut donner lieu à contestation que s’il tombe directement sous le coup de l’une des dispositions générales prévues aux articles 69, 70, et 71 ou s’il est de nature à créer une confusion avec le titre d’un journal ou écrit périodique déjà existant.

Les titres qui ne sont pas utilisés depuis au moins 24 mois tombent dans le domaine public.

ARTICLE 9

Tout journal ou écrit périodique est soumis aux formalités du dépôt légal conformément à la réglementation en vigueur.

Cinq exemplaires du journal ou écrit périodique sont mis à la disposition du Procureur de la République, du Conseil National de la Presse et du Ministère chargé de la Communication.

Les sociétés de distribution sont chargées de leur acheminement.

ARTICLE 10

Avant d’entreprendre toute activité publicitaire sur le territoire ivoirien, l’entreprise de presse est tenue de se soumettre aux formalités du Conseil Supérieur de la Publicité dans les conditions prévues par la réglementation en vigueur.

 ARTICLE 11

Toute publication à caractère pornographique ou attentatoire aux bonnes mœurs ne peut être mise à la disposition du public que sous emballage et ne peut être vendue à la criée.

Toute publication à caractère pornographique mettant en scène des enfants et incitant à la pédophilie est interdite.

TITRE II - DE L’ENTREPRISE DE PRESSE

ARTICLE 12

L’entreprise de presse est obligatoirement créée sous la forme d’une société ayant un capital social d’au moins 5.000.000 de francs. Les associés, actionnaires, commanditaires ivoiriens d’une personne physique ou morale propriétaire d’une entreprise de presse doivent détenir au moins la majorité du capital social.

Dans le cas de société par actions, les actions doivent être nominatives. Tout transfert doit être agréé par le conseil d’administration de la société.

ARTICLE 13

La société commerciale propriétaire d’un journal ou écrit périodique, avant la déclaration de publication, doit faire la preuve : 

- des statuts de la société dûment constituée ;

- de la déclaration notariée de souscription libérée au quart ;

- du paiement du droit d’enregistrement ;

- de la déclaration de constitution légale ;

- de son inscription au registre de commerce ;

- de sa déclaration fiscale d’existence ;

- de l’existence d’un compte bancaire.

Elle doit satisfaire à l’obligation de déclaration à la Caisse Nationale de Prévoyance Sociale en abrégé CNPS dans un délai de six mois.

Elle est tenue de satisfaire aux obligations mises à la charge de tout employeur par la législation sociale en vigueur et de tenir une comptabilité autonome selon les règles de l’OHADA.

ARTICLE 14

L’utilisation de prête-nom est interdite à toute personne qui possède ou contrôle une entreprise de presse.

Dans la présente loi, le mot « contrôle » s’entend de la possibilité pour une personne d’exercer sous quelque forme que ce soit et par tous moyens d’ordre matériel ou financier une influence déterminante sur la gestion ou le fonctionnement d’une entreprise de presse.

ARTICLE 15

Tout écrit à caractère publicitaire de présentation rédactionnelle doit être précédé de la mention « publicité » ou « communiqué » ou « publi-reportage ».

ARTICLE 16

Toute entreprise de presse est tenue dès sa création de compter au titre de son personnel permanent des journalistes professionnels au sens de la réglementation en vigueur dont obligatoirement le rédacteur en chef, le rédacteur en chef adjoint ou le secrétaire général de la rédaction.

L’équipe rédactionnelle des quotidiens et des périodiques  doit être composée en majorité de journalistes professionnels.

ARTICLE 17

Tout journal ou écrit périodique doit porter les informations suivantes à la connaissance des lecteurs :

            A – Dans chaque numéro de publication : 

1) la dénomination, la raison sociale, la forme de la société et le nom de son représentant légal ; 

2) le nom du directeur de publication et celui du responsable de la rédaction ; 

3) le tirage mentionné dans l’ours ; 

4) le numéro du dépôt légal.

Si le journal a été confié à un gérant ou à une société de gérance, les obligations prescrites aux points 1er et 2ème sont à la charge également du gérant ou de la société de gérance. 

           B – Une fois par an, au cours du premier trimestre de l’année civile suivante ; 

1) le tirage moyen et la diffusion moyenne sur l’année écoulée ; 

2) la publication du niveau de vente des journaux par région et par département ;  

3) le nom du gérant ou la composition des organes de direction et d’administration et la liste des actionnaires ou porteurs de parts avec le nombre d’actions ou de parts de chacun ; 

4) la liste complète des journalistes professionnels, des rédacteurs fixes ou occasionnels.

 ARTICLE 18

Toute entreprise de presse doit, à l’initiative du cédant, porter à la connaissance du Conseil National de la Presse, dans le délai d’un mois à compter de la date à laquelle elle en acquiert elle-même la connaissance, ou lors de la prochaine parution : 

1) toute cession ou promesse de cession de droits sociaux ayant pour effet de donner à un cessionnaire au moins un tiers du capital social ou des droits de vote ; 

2) tout transfert ou promesse de transfert de la propriété ou de l’exploitation de ce journal ou écrit périodique. 

Toute modification du capital de l’entreprise de presse doit être portée à la connaissance du Conseil National de la Presse dans le délai prévu à l’alinéa 1er.

ARTICLE 19 

Toute personne qui cède un titre de publication en informe le Conseil National de la Presse dans les trente jours précédant  la cession et lui fait connaître le nom du cessionnaire. 

TITRE III - DU DIRECTEUR DE PUBLICATION

ARTICLE 20 

Le directeur de publication doit être une personne physique de nationalité ivoirienne. Il doit être majeur et jouir de ses droits civils et civiques.  

ARTICLE 21 

Le directeur de publication est civilement responsable du contenu du journal. Sa responsabilité est engagée pour tout article publié. 

Les fonctions de directeur de publication ne peuvent être déléguées. 

ARTICLE 22 

Tout auteur qui utilise un pseudonyme est tenu d’indiquer par écrit, avant insertion de ses articles, son véritable nom au directeur de publication. 

L’usage de plus d’un pseudonyme, est interdit sous un même titre. 

En cas de poursuites judiciaires contre l’auteur d’un article signé d’un pseudonyme, le directeur de publication, à la demande du Procureur de la République saisi d’une plainte, doit fournir la véritable identité de l’auteur.

L’obligation est faite au directeur de publication de connaître l’identité des auteurs de contributions extérieures sous peine des mêmes sanctions.

 TITRE IV - DU JOURNALISTE PROFESSIONNEL

ARTICLE 23 

Est journaliste professionnel, dans les conditions prévues par la présente loi, toute personne physique : 

- justifiant d’un diplôme supérieur délivré par une école professionnelle de journalisme, à défaut, d’une licence de l’enseignement supérieur assortie d’une formation professionnelle de deux ans ou à défaut, d’une maîtrise de l’enseignement supérieur ou d’un diplôme équivalent, assorti d’une formation professionnelle d’un an dispensée dans une école de journalisme agréée ou reconnue par l’Etat ou d’un stage professionnel d’un an ; 

- ayant pour occupation principale, régulière et rétribuée, la recherche, la collecte, la sélection, l’exploitation et la présentation de l’information ; 

- exerçant cette activité dans une ou plusieurs publications quotidiennes ou périodiques, ou dans une ou plusieurs entreprises de communication audiovisuelle, ou dans une ou plusieurs agences de presse soumises à la Convention Collective ou au Statut Général de la Fonction Publique. 

La qualité de journaliste professionnel est attestée par la carte d’identité de journaliste professionnel. 

ARTICLE 24 

Le correspondant de presse de nationalité ivoirienne, représentant un organe d’information ivoirien, qu’il travaille sur le territoire national ou à l’étranger, est un journaliste professionnel ivoirien s’il reçoit des appointements fixes et remplit les conditions fixées à l’article 23. 

ARTICLE 25 

Le titulaire d’un diplôme de journalisme n’est pas un journaliste professionnel s’il ne remplit pas les conditions fixées aux articles 23 et 24 ci-dessus. 

ARTICLE 26

            Dans l’exercice de ses activités, le journaliste professionnel bénéficie d’une totale liberté quant à la collecte et à l’exploitation de l’information.

            Toutefois, dans l’expression de cette liberté, il est tenu au respect des lois et règlements de la République et des droits et libertés d’autrui ainsi que des règles déontologiques de la profession.          

ARTICLE 27 

Le journaliste professionnel peut se prévaloir de la clause de conscience pour rompre le contrat qui le lie à une entreprise de presse si l’orientation nouvelle de ladite entreprise est en contradiction avec les termes du contrat. 

La clause de conscience est évoquée lorsque le changement de la ligne éditoriale du journal heurte la conscience du journaliste. Le journaliste est tenu de le justifier par écrit. 

ARTICLE 28

            En dehors des cas où la loi lui en fait obligation, le journaliste professionnel n’est pas tenu de révéler ses sources d’information.          

ARTICLE 29 

            Sont qualifiés de professionnels de la communication :

- les producteurs,

- les animateurs,

- les réalisateurs,

- les documentalistes,

- les correcteurs,

- les traducteurs,

- les maquettistes,

- les photographes de presse,

- les dessinateurs de presse,

- les preneurs de son,

- les opérateurs de prise de vue, à l’exclusion des agents de publicité. 

La qualité de professionnel de la communication est attestée par la carte d’identité de professionnel de la communication.

TITRE V - DE LA CARTE D’IDENTITE DE JOURNALISTE PROFESSIONNEL ET DE PROFESSIONNEL DE LA COMMUNICATION ET DE LA COMMISSION   PARITAIRE DE LA CARTE

ARTICLE 30 

Peuvent seules se prévaloir de la qualité de journaliste professionnel ou de professionnel de la communication, les personnes remplissant les conditions énumérées aux articles 23, 24 et 29. 

Toute personne qui en a la qualité a droit à une carte d’identité de journaliste professionnel ou de professionnel de la communication. 

Les modalités de délivrance de la carte d’identité de journaliste professionnel ou de professionnel de la communication, la durée, la validité et les formes de leur renouvellement ou de leur retrait sont fixées par la commission paritaire  prévue à l’article 32.

 ARTICLE 31 

Est passible des peines prévues par les articles 284 et 285 du code pénal réprimant le faux et usage de faux, quiconque aura :

 - fait une fausse déclaration en vue d’obtenir la carte d’identité de journaliste professionnel ou celle de professionnel de la communication ;

 - fait usage d’une carte obtenue frauduleusement ou annulée ;

 - délivré sciemment des documents inexacts afin de faire attribuer ladite carte, sciemment fabriqué ou utilisé de fausses cartes d’identité de journaliste professionnel ou de professionnel de la communication.

 ARTICLE 32 

Il est créé  une commission paritaire d’attribution de la carte d’identité de journaliste professionnel ou de professionnel de la communication.  

Sa composition, son organisation et son fonctionnement sont fixés par décret pris en Conseil des Ministres. 

ARTICLE 33 

            La Commission paritaire d’attribution de la carte d’identité de journaliste professionnel ou de professionnel de la communication est chargée de l’attribution de la carte d’identité professionnelle. 

La Commission paritaire dispose à ce titre d’un pouvoir disciplinaire.

ARTICLE 34 nouveau 

En cas de manquement aux règles d’éthique et de déontologie, la commission paritaire d’attribution  de la carte d’identité de journaliste professionnel ou de professionnel de la communication peut prononcer les sanctions suivantes : 

  1. l’avertissement ;

  2. le blâme ;

  3. la suspension ;

  4. la radiation. 

La suspension entraîne de plein droit le retrait de la carte d’identité et la radiation entraîne son retrait définitif. 

ARTICLE 35 nouveau                                

            La commission paritaire d’attribution de la carte d’identité de journaliste professionnel ou de professionnel de la communication peut être saisie à tout moment par tout intéressé. Elle peut aussi se saisir d’office. 

            Les décisions de la commission paritaire sont susceptibles de recours, en cas de contestation, devant les organes de régulation siégeant en formation collégiale et le cas échéant, devant les juridictions compétentes. 

ARTICLE 36

            Pour l’accomplissement de sa mission, la Commission paritaire d’attribution de la carte d’identité de journaliste professionnel ou de professionnel de la communication dispose d’un Secrétariat permanent. 

ARTICLE 37

            La Commission paritaire d’attribution de la carte d’identité de journaliste professionnel ou de professionnel de la communication établit son règlement intérieur.